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Qui était Fiore dei Liberi ?

Fior Furlano dei Liberi de Cividale, autrement appelé Fiore dei Liberi, est un maitre d'armes ayant vécu au XIVème siècle dans le nord de l'Italie, au sein d'une province qui se nommait le Frioul (ancienne région, qui s'étendait des provinces actuelles d'Udine et Pordenone aux provinces de Gorizia et de Venise).

 

Sa naissance peut être placée entre 1350 et 1355. Il serait né à Cividale del Friuli (anciennement appelée Ostria), dans le diocèse du patriarcat d'Aquilée, et c'est ainsi qu'il est présenté dans les rares documents d'archives à notre disposition. Les quelques indications mentionnées cà-et-là dans les textes précisent qu'il serait le descendant d'un certain "Benedetto" de la noble maison des Liberi issus de la ville de Premariacco, proche du centre urbain d'Udine.

 

Il existe plusieurs hypothèses sur l'origine du patronyme "Liberi". Certains mettent en avant une possible famille bourgeoise du Frioul, d'autres insistent sur les preuves de la noblesse de Fiore, notamment sa maîtrise de la lance à cheval et ses liens avec les nobles de l'Italie du Nord. La littérature en fait un descendant de Cristallo dei Liberi de Premariacco, à qui le Saint Empereur romain germanique Henri V a accordé un statut noble en 1110, mais le lien de parenté n'est toujours pas prouvé de nos jours.

 

C'est en 1383 que l'on trouve la première apparition du nom de Fiore dei Liberi dans un acte de la ville d'Udine. Il s'agit d'une délibération du conseil municipal datée du 30 septembre, où les échevins lui confient la noble tâche d'examiner la totalité de l'arsenal de la commune et de remettre en état les arbalètes défectueuses.

Au mois de février 1384,  un document qui décide de la vente de biens confisqués et d'une demande d'aide à la ville voisine de Venise nomme encore un certain Fiore dei Liberi afin d'escorter le parlementaire Domenico Parussini.

 

Un autre document d'archives de la ville d'Udine retraçant le déroulement d'une séance du conseil du 23 mai de la même année mentionne la présence de Fiore dei Liberi sous le titre de "Magister Florius Scarmitor", pouvant être traduit par "Maître Fiore, escrimeur". Ce document, qui s'inscrit dans un contexte de guerre civile, précise l'affectation de Fiore à une compagnie militaire en tant qu'éclaireur et le mentionne comme faisant partie des 354 citoyens nommés comme gardiens de la paix dans tout le Frioul, rattaché à la ville de Gemona. Dans ce rôle, il avait pour mission d'assister les autorités en place (seigneurs et capitaines) pour le maintien de l'ordre et de la tranquillité publiques en veillant à ce que la justice pénale soit appliquée à tout contrevenant ou transgresseur.

 

Après la guerre civile, la présence de Fiore dei Liberi est mentionnée par certains contemporains à Padoue, à l'occasion d'un duel opposant l'un de ses étudiants, Galeazzo da Montova, au célèbre maréchal de France Boucicaut. Cet évènement, annoncé à l'avance et attendu par beaucoup, a attiré plus de 10 000 personnes. C'est l'italien qui a eu le dessus sur le français. L'origine de la dispute portait sur une insulte de Boucicaut, accusant les italiens de lâcheté.

Enfin, en 1399, un certain Fior Furlano apparait dans les registres d'état civil de Pavie en tant que "condottiere" (mercenaire).

 

On sait également aujourd'hui que Fiore dei Liberi était le maître d'armes de Niccolo III d'Este, marquis de Ferrare. Au service de la famille d'Este, il donnait des leçons aux nobles chevaliers de toute origine, désireux d'apprendre le maniement des armes, contre valeur pécuniaire. Parmi ses élèves, nombreux sont ceux dont le nom fut connu par de hauts faits d'armes, que ce soit en tournoi, en duel ou en temps de guerre. On présume qu'il serait décédé en 1420, mais l'absence de sources sûres rend toutefois cette affirmation spéculative.

 

Fiore de Liberi est l'initiateur de la seule tradition martiale médiévale survivante de langue et de culture italienne: le "Flor di Battaglia" ou "Flos Duellatorum". Quatre de ses ouvrages nous sont parvenus, les voici par ordre de datation chronologique:

  • le Ms. Ludwig XV13, conservé au Getty Museum de Los Angeles (aurait été écrit aux alentours de 1404)
  • le Ms 383, conservé à la Morgan Pierpont Library de New-York (aurait été écrit aux alentours de 1404)
  • le manuscrit de la collection Pisani-Dossi, édité par l'historien Francesco Novati en 1902 (aurait été écrit aux alentours de 1409)
  • le Ms Latin 11269, conservé à la Bibliothèque Nationale de Paris (aurait été écrit aux alentours de 1410 et 1420)

Ils sont bâtis sur un modèle relativement identique et développent une pédagogie absolument fascinante pour l'époque, présentant une succession d'illustrations ainsi qu'un commentaire associé à chaque situation. Les prologues de ces ouvrages, écrits par l'auteur lui-même, sont riches d'informations quand au personnage que fut Fiore dei Liberi.